Pollution
Humain
Environnement
Economique

Dans une vinaigrerie de 3 000 m², une cuve de 150 m³ contenant 40 m³ de vinaigre d’alcool explose vers 9h40 lors de travaux de soudure. La cuve, de 13 m de hauteur et 4 m de diamètre, est projetée par effet missile. Elle traverse le toit et atterrit à 80 m du bâtiment, sur la ligne ferroviaire Nîmes-Grau du Roi. Les secours transportent à l’hôpital 2 employés blessés, dont l’un gravement brûlé. La circulation ferroviaire est interrompue. L’alcool écoulé est collecté dans le bassin de rétention. Le bâtiment jouxtant la cuve est gravement endommagé et menace de s’effondrer. Les cuves voisines, non fixées au sol, sont déformées à la suite de leur déplacement et de leurs projections les unes sur les autres. Les pompiers éteignent un départ de feu dans les bureaux probablement dû à un endommagement de l’installation électrique.

L’usine était en cours de démarrage à la suite du déménagement du site. Les travaux de montage des tuyauteries n’étaient pas achevés. Compte tenu du manque de place pour les stocker, les en-cours de fabrication étaient entreposés dans les cuves en attente de raccordement. Les cuves contenant des liquides de titre alcoolique inférieur à 11 % pouvaient faire l’objet de travaux de montage sans être vidées.

La cuve concernée avait été utilisée pour récupérer un mélange d’alcools issus de transferts effectués 5 mois plus tôt. Son degré alcoolique avait été estimé à 9 %. L’opération prévue consistait à fixer 2 pattes pour maintenir les tuyauteries. L’une était prévue à 2,10 m du sol (1 m en dessous du liquide), l’autre à 5,70 m (2,60 m au-dessus). L’explosion a eu lieu alors que la 2ème soudure venait de démarrer. Un bruit de décompression a été perçu par les soudeurs quelques secondes avant l’explosion.

Le bilan réalisé par l’exploitant après l’accident conclut que le mélange contenu dans la cuve avait un degré alcoolique effectif proche de 20 %. L’expertise réalisée par un organisme spécialisé montre que l’intervention réalisée sur la cuve en dessous du niveau du liquide a probablement provoqué un échauffement local, portant la température du liquide de 30 °C à une température proche du point éclair (36 °C pour un mélange à 20 %). Cet échauffement a sans doute créé une atmosphère explosive dans une partie du ciel gazeux de la cuve. La 2ème soudure effectuée au niveau de la phase gazeuse a provoqué un point chaud suffisant pour enflammer le mélange. L’étude montre qu’il suffit que 10 à 20 % du volume du ciel gazeux de la cuve soit à la concentration de la LIE pour provoquer les effets constatés. Une autre possibilité est que le courant utilisé pour la soudure ait généré un phénomène d’électroérosion avec génération d’hydrogène car le réservoir en acier inox contenait de l’acide acétique (le fer est attaqué par les acides dilués avec dégagement d’hydrogène). Si on prend en compte les vapeurs d’éthanol déjà présentes dans le ciel gazeux, il est possible qu’un léger appoint d’hydrogène (LIE à 4 %) ait suffi pour rendre l’ensemble du mélange inflammable.

D’un point de vue organisationnel, l’accident est dû à la conjonction de plusieurs causes et circonstances :

  • une erreur d’appréciation de la concentration en alcool. Le mélange impliqué avait été réalisé cinq mois auparavant. Il était atypique, puisque les mélanges eau / alcool utilisés habituellement sur le site ne dépassent pas un degré alcoolique de 11 %. Il n’avait pas été identifié comme tel
  • des travaux démarrés sans plan de prévention, ni permis de feu, en infraction à l’arrêté préfectoral d’autorisation
  • la mise en service de l’usine sans procéder au contrôle de conformité prévu par l’arrêté préfectoral d’autorisation
  • une concentration en phase vapeur, avant travaux, proche des 2/3 de la LIE à cause des températures extérieures élevées (35 °C).

Par ailleurs, le système présentait toutes les conditions requises pour engendrer les effets observés :

  • cuve résistante à la pression et non fragile au niveau de la liaison virole/dôme
  • cuve de forme allongée et compression des gaz lors de la déflagration jusqu’à la rupture de la liaison virole/fond
  • présence de liquide en pied, éjecté à grande vitesse, augmentant le rendement de propulsion.

Cependant, compte tenu de l’énergie disponible, l’onde de choc s’est dissipée de façon amortie en raison de la part d’énergie prélevée pour la rupture de la cuve, de la toiture et du bardage et pour la projection de la cuve, limitant les conséquences de l’explosion.

La mise en service du nouveau site, prévue pour la fin du mois d’août est repoussée.

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