Pollution
Humain
Environnement
Economique

Dans une usine chimique, un opérateur, supervisant une synthèse par batch d’un produit anti-oxydant pour liquides hydrauliques et graisses, détecte visuellement à 16h15 une fuite de phénol pur à 70 °C sur la tuyauterie tracée alimentant le réacteur de synthèse depuis des cuves de stockage de 50 m³ implantées dans un autre bâtiment. L’opérateur brise la vitre du système d’alarme de l’atelier et stoppe le pompage du phénol dans le réacteur. Une dizaine d’employés évacuent les étages du bâtiment après avoir mis en sécurité les procédés en cours. Le POI est déclenché à 17h30. L’adjoint du chef d’équipe reçoit des gouttes de phénol chaud (liquide toxique et corrosif) à l’avant-bras et au cou en posant des bouchons de sol au 3e étage sans EPI adapté malgré la formation reçue sur les dangers du phénol. Un autre opérateur ressent une sensation d’irritation sur le visage en évacuant le 3e étage saturé de vapeurs de phénol. Ils reçoivent les premiers soins à l’infirmerie du site, puis sont hospitalisés pour surveiller leur taux de phénol qui passe de 8-14 ppm à 1,5 ppm en 3 h. Ils reprennent leur travail le soir même. Le POI est levé à 21 h mais le bâtiment reste condamné dans l’attente d’être nettoyé. L’exploitant informe l’inspection des IC. Une flaque de 30 m² s’est formée au 3e étage de distribution au-dessus de celui du réacteur, mais du phénol s’est écoulé jusqu’au 1er étage par les interstices du plancher en formant une flaque de 2 m² malgré la pose d’avaloirs au sol du 3ème étage. Le phénol (Ps : 41° C à P. atm) se solidifiant sous forme de cristaux ne provoque aucune atteinte à l’environnement. La quantité perdue est évaluée à 367 kg – 200 l, elle est récupérée par grattage et lavage à l’eau chaude, puis conditionnée en fûts spéciaux avant d’être éliminée dans une filière agrée. Les autres productions de l’usine redémarrent le jour même, celle utilisant le phénol 45 jours après une fois l’unité décontaminée. Les dommages matériels sont évalués à 150 keuros et les coûts de décontamination à 100 keuros.

L’enquête réalisée par l’exploitant montre que le pompage du phénol dans le réacteur a débuté 1 h avant la détection de la fuite, mais que celui-ci avait été interrompu 40 min après pour régler l’automate de dépotage. la fuite a été détectée 4 min après la reprise du pompage par l’opérateur sans qu’aucune alarme du débitmètre ne se déclenche. Un joint PGAS situé entre deux brides sur le circuit de retour vers les cuves de stockage du phénol est à l’origine de la fuite. L’expertise menée pour déterminer la cause de cette fuite, écarte la surpression car la ligne d’alimentation en phénol est tracée électriquement (évitant la possibilité de bouchage partiel ou total de la ligne) et la cuve est équipée d’une pompe centrifuge à accouplement magnétique dont la pression de refoulement (4 bar maxi) est inférieure à la pression maximale supportée par la ligne. Un défaut dans le montage initial du joint pourrait avoir conduit à son vieillissement prématuré. Les équipements de cette ligne d’alimentation ne sont pas soumis à des contrôles réguliers internes ou réglementaires, le scénario de fuite de phénol ne présentant que des dangers mineurs du fait de sa solidification dans les conditions ambiantes (pas d’effets hors du site).

L’exploitant supprime la conduite de retour entre le bâtiment production et celui des cuves de phénol (inutile pour le nouveau débitmètre installé), remplace les brides tournantes par des brides soudées et les joints en place par des joints spiralés partiellement métal. Il modifie la fréquence des contrôles périodiques des tuyauteries pour qu’elle corresponde à celle des cuves, améliore la procédure d’intervention en cas d’urgence, prévoit un exercice annuel sur un scénario de fuite et installe des EPI de protection contre le phénol à chaque étage du bâtiment de production.