Pollution
Humain
Environnement
Economique

Vers 14 h, un technicien de maintenance pénètre dans la salle de traitement des eaux usées d’une entreprise de recyclage de déchets domestiques dangereux (peintures, nettoyants, pesticides, solvants…). Alors qu’il approche du clarificateur (réservoir à toit ouvert avec un fond conique pour la précipitation des solides), il remarque une odeur d'”oeuf pourri” qui se renforce à mesure de son avancée. Il rencontre des difficultés respiratoires et tente de fuir quand il s’effondre asphyxié par les émanations de sulfure d’hydrogène (H2S). Des collègues trouvent la victime quelques instants plus tard et l’amènent en sécurité.

La veille, des déchets aqueux contenant divers contaminants dont des métaux lourds avaient été reçus. Après prélèvement et analyse, un opérateur expérimenté détermine le traitement nécessaire et le commence. Plus tard le jour même ou le lendemain matin, l’opérateur échantillonne le liquide traité dans le clarificateur et constate que la teneur en mercure est au-dessus de la limite autorisée pour un rejet dans les égouts municipaux (0,02 ppm). L’opérateur ajoute donc 25 kg de sulfure de sodium (Na2S) en flocons dans le décanteur pour précipiter le mercure (procédé « typique » pour l’élimination de métaux via la formation d’un sel). Comme l’équipement n’est pas équipé d’un agitateur, l’opérateur raccorde un tuyau d’air de l’usine au décanteur pour assurer le mélange. Après décantation, la teneur en mercure s’avère correcte, mais le PH est trop élevé (à cause de l’alcalinité de Na2S en excès). L’opérateur ajoute en quelques heures 600 l d’une solution fortement acide de chlorure de polyaluminium (PAC) pour ajuster le pH avant rejet.

Or, le système « bricolé » pour le mélange (injection d’air dans le décanteur) ne permet pas de dissoudre les flocons de Na2S ni de distribuer la PAC fortement acide. Les 2 produits incompatibles entrent en contact et produisent du H2S qui s’échappe par le haut de la cuve ouverte.

Vers 14 h, un ingénieur est informé de la forte odeur de H2S ; le temps qu’il aille chercher un détecteur de gaz portatif, le mécanicien, entré dans la salle pour récupérer un outil, s’était effondré. L’exploitant estime qu’1 kg de H2S a été libéré.

Les experts du bureau de la sécurité chimique (US CSB) soulignent que les déchets ont été traités chimiquement dans un équipement non conçu pour un tel usage : la cuve de traitement (fermée, ventilée vers un épurateur et équipée d’un agitateur) aurait dû être utilisée. Ils pointent des manquements graves dans le systèmes de gestion de la sécurité, notamment l’absence :

  • de procédures écrites d’exploitation (l’exploitant s’appuyait essentiellement sur les connaissances du personnel avec plusieurs années d’expérience),
  • de formation formelle des employés (par exemple les risques de mélange de produits chimiques incompatibles, les risques H2S…).
  • de communication entre les opérateurs et le personnel (sur les opérations normales, les incidents, les risques…)

Un détecteur avait été installé à la suite d’un précédent incident, mais le détecteur n’était pas inspecté, calibré ni maintenu et la tête du capteur était par conséquent en panne.

L’exploitant développe son système de gestion de la sécurité, intégrant des procédures écrites et un plan de formation du personnel. Il améliore la ventilation du local et les dispositifs de détection.