Pollution
Humain
Environnement
Economique

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Pendant la 2nde guerre mondiale, une série d’explosions d’un entreposage de plus de 100 t de nitrocellulose à fort taux d’azote (“coton poudre” ou “CP”) se produit lors du déchargement d’un train dans une poudrerie. Le bilan est de 80 morts et de plusieurs centaines de blessés. Un cratère de 40 m de diamètre et de 12 m de profondeur s’est formé. Les installations sont totalement détruites dans un rayon de 150 m. Des dégâts matériels sont recensés dans un rayon de 850 m.

Le CP est un produit énergétique dont le mode de décomposition (combustion, détonation) et la sensibilité aux agressions mécaniques et thermiques sont fortement conditionnés par son taux d’humidité. L’imprégnation de la nitrocellulose avec un mouillant est nécessaire pour permettre sa manipulation et sa mise en œuvre dans des fabrications dans des conditions de sécurité acceptables.

Alors qu’en temps de paix, la conservation du CP dans les poudreries était réalisée dans des silos en béton étanches, et en appliquant des méthodes visant à garantir la sécurité des opérations de manutention/stockage/emploi (maintien d’un taux d’humidité supérieur à 25 %, éviter chocs et frottements), les conditions d’exploitation étaient particulièrement dégradées dans cette poudrerie en temps de guerre.

Dans un contexte de manque de disponibilité de CP conforme aux spécifications techniques nécessaires à la fabrication d’une poudre à canon pour l’armée allemande, et en raison des impératifs imposés par les autorités allemandes, des lots de CP ne répondant pas aux exigences de sécurité étaient en cours de déchargement et de mise en stockage. Le CP avait été acheminé par train depuis une autre poudrerie. Les lots de CP étaient conditionnés dans des caisses en bois de 150 kg de poids brut. Bien qu’habituellement réservées uniquement aux transports, en raison de leur manque d’étanchéité ne permettant pas de garantir un maintien prolongé du taux d’humidité, ce CP avait été stocké dans ces caisses depuis 3 ans, en extérieur, exposé au soleil et intempéries. De nombreuses caisses étaient en mauvais état, avec des interstices laissant du produit de s’échapper au sol. Elles comportaient des clous et ferrures en saillie en fer (en remplacement des éléments en bronze réquisitionnés pour la fabrication de matériel de guerre).

Avant l’expédition, le taux d’humidité du CP contenu dans ces caisses était réputé être compris entre 10 et 40%. Les résultats de prélèvements réalisés lors du déchargement du train le samedi 16 octobre, 2 jours avant l’accident, montreront que les 3/5 du lot présentaient un taux inférieur à 12,5%, seuil en dessous duquel le CP est défini comme « sec » et peut détoner en cas d’inflammation.

Le rythme de travail imposé par les autorités allemandes empêchait de réaliser des opérations efficaces de réhydratation du CP par arrosage prolongé des caisses. Des départs d’incendie liés à des frottements avaient eu lieu aux mois de mai, juin et juillet à partir des trainées de CP répandues au sol. Les employés étaient conscients des dangers présentés par ce CP sec.

L’accident est survenu lors du déchargement des caisses de CP des 2 derniers wagons du train. Une inflammation de CP répandu sur le plancher du wagon, occasionnée par un choc/frottement/étincelle (potentiellement favorisée par les clous et ferrures des caisses), s’est produite lors des manipulations des caisses de CP par 2 personnes dans un des deux wagons. L’inflammation du CP s’est étendue très rapidement par les trainées au sol avant d’atteindre, à une dizaine de mètres, 70 t de CP contenues dans des caisses déjà déchargées et entreposées en attente d’ensilage, et 9 t encore dans les wagons. La quasi-totalité de ce CP a alors détoné. La détonation résulte d’un premier phénomène de « Transition Déflagration Détonation » des 25 % de CP sec (moins de 12,5 % d’humidité) propagée instantanément au reste de ce CP par un second phénomène de « Transition Choc Détonation » du reste du CP plus humide.

Des projections enflammées ont ensuite amorcé les 2 autres explosions d’une partie des 9 t et 42 t de CP situées à une vingtaine de mètres, en caisse et en silos. Les retombées enflammées sur les produits contenus dans les bâtiments de fabrication de poudre ont conduit à la propagation progressive de l’incendie aux différents dépôts de poudre du site. Au total, 800 t de poudre ont été détruites.

De nos jours, en France, la conservation de la nitrocellulose ne se fait plus en silos. Elle est réalisée dans des emballages étanches souvent utilisés également pour le transport (sac plastique, contenu dans un suremballage en carton, plastique, bois ou métallique) et contenant individuellement au maximum quelques dizaines de kg. Ce conditionnement vise à se prémunir du risque d’épandage et limite la perte d’humidité de la nitrocellulose. En cas de conservation de produit sur des longues périodes, le taux d’humidité de la nitrocellulose est régulièrement vérifié (semestriellement ou annuellement).