Pollution
Humain
Environnement
Economique

Dans une usine de thiochimie, un opérateur intervient, vers 17h40, sur un bac de stockage à proximité d’une fosse recevant les eaux usées d’une unité ayant redémarré la veille quand il est intoxiqué par des vapeurs dégagées par cette fosse composées de méthanol et de methyl mercaptan (MM ou méthanethiol, gaz toxique à haute concentration et fortement odorant). Il s’éloigne de la zone mais, victime d’une détresse respiratoire, doit être secouru par des employés proches puis évacué par les pompiers de l’usine vers un hôpital. Conformément aux dispositions en vigueur sur la plate-forme, l’exploitant ne déclenche pas de POI mais une alerte de zone, 240 personnes présentes sur la zone concernée sont évacuées. Le bruit de la sirène et les odeurs dégagées par le MM incommodent les riverains qui se plaignent à la mairie. Les unités de production sont arrêtées et le réseau des eaux usées biodégradables est isolé puis rincé à l’eau, les eaux usées étant détournées vers un bassin de confinement pour permettre le fonctionnement de la station d’épuration des eaux usées de la plate-forme chimique. L’alerte interne est levée à 20h15 et l’activité reprend une fois la situation maîtrisée. L’exploitant rédige un communiqué de presse.

Un défaut de calibrage du conductimètre utilisé pour mesurer la teneur en eau dans le pot de reflux (ballon) de la colonne de distillation de l’unité de synthèse du MM est à l’origine de l’accident. Faute d’avoir été recalibré lors de son installation plusieurs années avant avec les produits présents dans le pot (MM, eau et méthanol) et dans les conditions physiques existantes, celui-ci affiche en salle de contrôle un volume d’eau à purger supérieur au volume réel. Les opérateurs de conduite, appuyés par des cadres en raison du redémarrage de l’usine après un grand arrêt pour modernisation, lancent alors une purge du pot vers la colonne de recyclage du méthanol sans chercher à comprendre l’origine de ce volume anormalement élevé. Le MM présent dans le liquide purgé s’évapore rapidement sous l’effet de la chauffe et de la différence de pression existant entre la colonne de distillation et celle de recyclage. L’augmentation brutale de la pression dans cette dernière est détectée à 17h30 par un capteur qui déclenche une alarme en salle de contrôle et l’arrêt de la chauffe. Ne faisant pas le lien avec le volume d’eau anormal détecté peu avant, les opérateurs de conduite sont inconscients de la présence de MM dans la colonne de recyclage et déclenchent sa vidange dans le circuit des eaux usées selon la procédure en vigueur. L’exutoire habituel des eaux usées étant indisponible, le liquide vidangé est dirigé vers le réseau des eaux usées biodégradables arrivant dans la station de traitement du site, les opérateurs de la station étant informé d’une montée probable de la DCO en raison de la présence de méthanol. Un tronçon de ce réseau n’étant pas étanche, les vapeurs de MM et de méthanol qui se dégagent du liquide chaud arrivent dans la fosse des eaux usées de l’unité voisine.

L’exploitant n’avait pas prévu de recalibrer le conductimètre depuis sa sortie d’usine car il était utilisé pour des fonctions de conduite et non de sécurité. Le service instrumentation recalibre le conductimètre dès le lendemain, une bride pleine est posée sur le réseau des eaux biodégradables pour l’isoler provisoirement de la fosse. Les mesures correctives suivantes sont mises en place :

  • Ajout d’une sécurité de pression haute dans la colonne de recyclage fermant la vanne de vidange du pot de reflux et ouvrant les vannes de purge de la colonne vers le circuit des eaux usées ;
  • Pose d’un dispositif anti-retour entre la fosse et le circuit des eaux usées biodégradables ;
  • Pose d’un cadenas sur la vanne manuelle de bipasse en sortie du pot de reflux pour éviter un envoi accidentel de MM vers la colonne de recyclage ;
  • Modification des procédures de conduite de l’unité pour prendre en compte ce retour d’expérience, l’envoi du pot de reflux vers la colonne de recyclage étant une modification récente (moins d’un mois).