Pollution
Humain
Environnement
Economique

Sur une plateforme pétrochimique, 2 opérateurs de maintenance interviennent dans une usine d’engrais azotés. Après avoir déconnecté une pompe qui fuit sur une ligne (DN 150) d’ammoniac liquide (NH3) reliant les unités de fabrication à une sphère de stockage cryogénique sous pression (3,8 bar / -34 °C / 800 t), l’un des opérateurs heurte vers 14h45 et par inadvertance le levier de la vanne manuelle ¼ de tour de type papillon, non bloquée mécaniquement, isolant la sphère en amont de la pompe. La vanne s’ouvre à 5 % et 1,6 kg/s d’NH3 liquide s’échappe de la ligne de transfert durant les premières minutes. La flaque de la fraction liquide d’NH3 (88 %) formée dans la rétention de l’unité s’évapore au contact du sol à 25 °C et forme un brouillard dense. Equipés d’EPI standards, les 2 opérateurs sont aspergés d’NH3 liquide. L’un d’eux gravement brûlé à 40 % est transporté à l’hôpital par hélicoptère, le second est atteint au 2° degré aux pieds.

Détectant 3 min plus tard le nuage sur la vidéosurveillance, un opérateur en salle de contrôle actionne l’arrêt d’urgence de l’unité de stockage NH3, avec fermeture d’une vanne automatique en pied de sphère. Le chef de quart équipé d’un ARI quitte la salle 10 min après pour fermer complètement la vanne manuelle impliquée, ainsi que d’autres de sectionnement dans la rétention. Le débit d’NH3 diminue progressivement (0,2 kg/s entre 3 et 10 min) pour être nul 10 min plus tard. L’évaporation de la nappe d’NH3 se poursuit 90 min. Le POI est déclenché à 15h10. Les pompiers établissent une queue de paon avec 2 lances du site pour rabattre l’NH3 gazeux formé. Le volume d’NH3 perdu est évalué à 400 kg.

Le réseau de détection interne qui enregistrent jusqu’à 1 800 ppm d’NH3 dans l’air, n’est pas relié à un dispositif d’isolement automatique des sphères de stockage dont la commande doit obligatoirement se faire depuis la salle de contrôle. Les capteurs d’un autre établissement à 90 m au sud de l’unité accidentée ont détecté la fuite en 2 min et mis en sécurité les unités dont le personnel est évacué. Le personnel d’un 3ème site voisin également évacué ne pourra être recensé faute de joindre son poste de garde.

Le permis de travail avait été complété après une analyse préalable des dangers réalisée par le service d’exploitation, sans appui du service maintenance pour une opération à réaliser installations en fonctionnement. Une analyse de sécurité dans ces conditions de fonctionnement aurait montré le double isolement nécessaire de la ligne de transfert en amont de la pompe, en bloquant en position fermée la vanne de coupure en pied de sphère… Enfin, les opérateurs (15 ans d’expérience) portaient les EPI définis dans ce permis, mais non adaptés à une fuite d’NH3 liquide.

La pompe avait été isolée en amont et en aval par fermeture manuelle d’un jeux de vannes, la ligne de transfert avait été purgée à l’azote, puis un contrôle final d’absence de pression et d’odeur avait été réalisé. Les scénarios de fuite retenus dans la dernière étude des dangers prévoyaient une durée maximale de 2 min pour une fuite à 10 % du débit de la ligne de transfert avec une durée maximale de fermeture manuelle des vannes de sectionnement de la rétention de 5 min par un opérateur équipé d’ARI.

L’inspection du travail, des IC, la gendarmerie et l’exploitant effectuent des enquêtes. Les installations sont contrôlées et l’usine reprend ses activités le lendemain après-midi. L’exploitant prend plusieurs mesures qu’il diffuse dans le groupe :

  • mise en place de dispositif de double isolement sur les équipements et canalisations les plus à risque (double vanne avec purge entre les vannes et dispositif de blocage mécanique) ;
  • modification du type de vanne d’isolement choisi ;
  • révision des procédures de travaux sur ligne de transfert de produit toxique ou corrosif, port d’EPI complets adapté aux risques si absence de double isolement (ARI, combinaison anti-acide..), sensibilisation au port correct des EPI ;
  • asservissement de la détection NH3 à l’arrêt d’urgence de l’unité stockage ;
  • amélioration du POI : procédure d’alerte et de recensement des sociétés voisines, usage de mousse sur la flaque de NH3 plutôt qu’un rideau d’eau.