Pollution
Humain
Environnement
Economique

Vers 11h30, des particuliers inquiétés par un bruit inhabituel alertent une usine produisant du tétrafluorure d’uranium à partir de minerais uranifères. La destruction sur 180 m de long et 15 m de haut de la digue et du bassin de lagunage et d’évaporation n°2 entraîne la libération de la totalité du liquide retenu et la phase solide n’est plus confinée ; 15 000 m³ d’eaux de procédé et 10 000 m³ de boues riches en nitrates (ammonium, sodium, calcium) et en hydroxydes métalliques (Fe, Mg, Mo, V) se déversent dans un champ de 10 ha appartenant à l’exploitant sans atteindre le canal de TAURAN ni sortir du site. L’essentiel du rejet se concentre sur 4 ha couverts de 30 à 40 cm de matière, au pied des bassins 3, 5 et 6.

Les fabrications sont stoppées. L’inspection des installations classées constate les faits sur place le jour même. L’exploitant entreprend le 22/03 la construction d’un merlon ceinturant la zone impactée pour éviter la lixiviation des boues, l’écoulement vers le canal de TAURAN et l’aggravation de l’impact environnemental.

Un arrêté préfectoral du 23/03 impose la suspension immédiate de tout rejet d’effluents vers les bassins, le confinement du bassin endommagé, une surveillance renforcée du milieu naturel et des eaux superficielles et souterraines, une expertise de la stabilité des bassins et la remise d’un rapport d’accident. Le dispositif temporaire de retenue des boues du bassin 2 comprend, en plus du premier merlon, un second perméable à l’eau mais retenant les boues en contrebas du bassin et un fossé de collecte des eaux filtrées au travers des merlons avec renvoi par pompe vers les bassins intègres.

Le rejet occasionne une baisse importante des pressions hydrauliques exercées par le contenu du bassin 2 sur l’enceinte du bassin 3. Cette variation soudaine menace la pérennité de ce dernier et des bassins 5 et 6 qui lui sont contigus. Un service administratif spécialisé dans le suivi des barrages, ainsi que 2 bureaux d’études expertisent la stabilité de l’ensemble. Le suivi des bassins 3, 5 et 6 par 3 levées topographiques hebdomadaires (16 plots), complétés par des inclinomètres sur la crête des digues, le contrôle visuel de l’évolution des fissures et des relevés piézométriques dans les ouvrages ne met en évidence aucun mouvement préjudiciable.

Les analyses physico-chimiques commandées par l’exploitant établissent une élévation du taux de nitrates dans le canal de TAURAN avec un maximum de 170 mg/l le 23/03 avant retour à la valeur nominale de 50 mg/l le 29/03, niveaux jugés peu préjudiciable pour l’environnement. Les teneurs en métaux lourds (dont l’uranium) sont comparables à celles observées en exploitation normale du site. Les analyses radiologiques en limite de parcelle relèvent des doses équivalentes annuelles générées par les boues de 1 mSv. Le 26/03, l’exploitant isole physiquement les zones accessibles au public situées au voisinage de la limite de propriété.

Fin mars, l’exploitant traite la surface polluée à la chaux. Les boues et sols pollués sont ensuite raclés et placés en dépôt définitif dans le bassin 1. Le 31/03, un arrêté préfectoral autorise la reprise de l’activité après 12 jours d’arrêt. Les impacts environnementaux étant limités dans l’espace et le temps, aucune suite judiciaire n’est proposée.

La présence de fuites latérales sur le corps de digue constitué de stériles d’une ancienne exploitation de souffre avait été observée depuis 1980, donnant lieu à l’implantation d’un réseau de drains et de piézomètres. Des études d’impact sur les eaux superficielles et souterraines réalisées en 1991 et 1992 à la demande de l’exploitant avait établi une perméabilité partielle du fond des bassins 1 et 2 nécessitant de compléter le réseau de surveillance piézométrique. Un nouveau rapport d’étude de mars 1998 ayant évalué les rejets d’eau nitratée (77mg/l) de ces bassins vers le canal de CADARIEGE voisin à 10,5 m³/j, l’exploitant avait dévié ce dernier dans le canal de TAURAN pour enrayer la pollution chronique des eaux de surface.

Une fissuration profonde des boues du bassin 2 due aux chaleurs intenses de l’été 2003 et aux fortes pluies automnales aurait permis l’infiltration des eaux du bassin dans le corps de la digue entraînant sa saturation et l’élévation de la pression interstitielle conduisant à la rupture de l’ouvrage. L’exploitant avait constaté l’apparition d’une fissure longitudinale de 15 m de long en crête de la digue est du bassin 2 le 15/03 et en avait informé un bureau d’étude qui, redoutant une instabilité d’ensemble de l’ouvrage, n’avait pas encore remis ses conclusions au moment de la rupture.